1. Présentation

Composée de chercheurs en analyse de discours, en phonétique et en sciences cognitives, l’Unité Mixte de Recherche Praxiling (UMR 5267) est un laboratoire dont les travaux sont centrés sur le langage. La compréhension des processus neurologiques à l’origine de la production de sens et l’analyse du fonctionnement et des dysfonctionnements discursifs sont au cœur des recherches menées au sein de l’Unité. Sur ce plan, la spécificité de l’UMR réside dans le fait que le discours y est envisagé dans ses conditions concrètes de production, c’est-à-dire construit par des sujets en interaction, et lié à des pratiques situées (des « praxis »).

Les recherches émanant de Praxiling portent sur trois thèmes :

1. Discours, langue

2. Parole, interactions, santé

3. Connectivité, Plasticité, Cognition & Langage

Un thème transversal réunit l’ensemble des membres de l’unité :

Données et pratiques linguistiques à l’heure du numérique et de la science ouverte

Le laboratoire Praxiling est sous la double tutelle du CNRS et de l’Université Paul Valéry Montpellier 3,

1. Discours, langue

Responsables : Agnès Steuckardt & Sascha Diwersy

Le thème Discours, langue vise à proposer une modélisation des processus par lesquels se stabilisent, en langue, des phénomènes discursifs. Il s’agira de repérer et de circonscrire les différents paramètres entrant en jeu dans les phénomènes de changement linguistique, selon des diachronies courtes (trajectoires d’émergence), moyennes ou longues (lexicalisation, grammaticalisation, obsolescence). Le thème portera une attention particulière aux possibles de langue, notamment aux formations lexicales ou syntaxiques supposées non canoniques, à leur attestation en corpus, aux facteurs explicatifs de leur fréquence et de leur stabilisation dans l’usage.

Ces phénomènes seront observés à travers plusieurs médiations comme les types de textualité, les genres de discours et, plus largement, les traditions discursives. Différentes méthodologies seront sollicitées, depuis le recours aux outils informatiques de traitement de corpus jusqu’aux tests de perception.

2. Parole, interactions, santé

Responsables : Aleksandra Nowakowska  & Christelle Dodane

Les travaux se déploient ici en deux axes principaux autour de l’étude 1) des dysfonctionnements de la parole, et 2) des dispositifs interactionnels qui contribuent à ce que ces dysfonctionnements soient intégrés, voire surmontés. S’appuyant sur la constitution de corpus multimodaux, impliquant une ethnographie des situations, ces travaux explorent d’une part, les troubles du langage dans la production orale des enfants et des adultes, porteurs ou non d’un handicap, d’autre part, les dysfonctionnements langagiers dans la conversation. Ils incluent enfin l’analyse des cadres de participation – cliniques, ordinaires et artistiques – impliquant des personnes en situation de handicap (physique, mental et/ou psychique). Prenant appui sur l’étude du développement typique du langage (acquisition du langage), les recherches portent sur le fonctionnement normal, le dysfonctionnement et la remédiation du discours. En établissant une continuité entre les phénomènes phonétiques, discursifs et pragmatiques, et en proposant une analyse approfondie des relations entre les différentes modalités (parole, prosodie, gestes), ces travaux permettent une meilleure compréhension des dispositifs interactionnels qui contribuent à la réalisation d’une pertinence communicationnelle malgré l’existence d’une parole dysfonctionnelle. Les recherches traitent tout particulièrement des domaines de la disruption avec une attention portée aux phénomènes de réparation, de correction et de reformulation dans la production orale spontanée et dans les interactions multiparticipants, visant ainsi une meilleure saisie du sens en contexte.

3. Connectivité, plasticité, cognition, langage

Responsables : Guillaume Herbet

Les recherches translationnelles et transdisciplinaires que mène l’axe Connectivité, plasticité, cognition, langage (à l’interface entre sciences du langage et de la cognition, neuropsychologie computationnelle, neurosciences cognitives et médecine) visent à mieux comprendre l’architecture des systèmes cognitifs et langagiers complexes (p. ex. cognition sémantique et langagière, cognition sociale et spatiale, système de perception et de production de la parole, etc.), les réseaux neuronaux sur lesquels ils reposent (notamment leur connectivité structurelle et fonctionnelle mais aussi leurs interactions), la variabilité inter-individuelle de ces réseaux, leur atypie dans certains troubles où la cognition/le langage/la parole dysfonctionnent (p. ex. le bégaiement sévère) et leur capacité à se réorganiser/moduler suite à une atteinte lésionnelle (c.-à-d. la neuroplasticité postlésionnelle). De façon consubstantielle, nous nous intéressons aux mécanismes cognitifs et neuro-computationnels qui régissent la récupération postlésionnelle et la réhabilitation cognitive et langagière. Pour réaliser ces recherches, les chercheurs impliqués dans l’axe s’appuient sur une approche multimodale et intégrative incluant les évaluations comportementales, langagières et neuropsychologiques, la neuro-imagerie fonctionnelle et tractographique, la disconnectomique, la stimulation transcrânienne magnétique, la cartographie par électrostimulation directe pendant les chirurgies éveillées du cerveau et les techniques de modélisation prédictive et computationnelle (p.ex. réseaux psychométriques, théorie des graphes, intelligence artificielle). La valorisation des résultats
dans le domaine clinique constitue l’un des défis de cet axe. Cela se traduira notamment à travers la mise au point de stratégies innovantes de neuro-réhabilitation, l’optimisation des procédures de cartographie intra-opératoire des réseaux neuronaux pendant les neurochirurgies éveillées et l’élaboration de nouvelles approches neuro-oncologiques (p. ex. chirurgie cérébrale en plusieurs étapes basées sur le potentiel évolutif et individuel de la plasticité cérébrale). En synthèse, l’objectif de Connectivité, plasticité, cognition, langage est de tendre vers une clinique prédictive et ultra-personnalisée afin d’améliorer la qualité de vie des patients.

Thème transversal : Données et pratiques linguistiques à l’heure du numérique et de la science ouverte

Responsables : Sascha Diwersy et Nadia Makouar

Ce thème transversal a pour objet le développement d’une réflexion commune et croisée, d’ordre méthodologique et épistémologique, sur la construction des savoirs, des ressources et des méthodes d’analyse en linguistique, ainsi que sur le partage et la diffusion de ces connaissances, à l’heure des transformations induites par le numérique et la pluridisciplinarité.

Les travaux sur le développement de nouvelles pratiques dans les différentes (sous)-disciplines linguistiques représentées dans le laboratoire seront articulés suivant quatre volets : (i) objets d’étude et données de recherche, (ii) concepts et méthodes, (iii) outils et environnements numériques, (iv) éthique de la recherche.

Sans exhaustivité et sans hiérarchiser leur portée et intérêt, parmi les questions que nous souhaitons approfondir, il y a : rapports objets d’étude – observables ; complexité, hétérogénéité, réticularité et multimodalité ; production des données de recherche à partir des sources anciennes, recueil et documentation de la parole ‘actuelle’ ;  sérendipité ; crowdsourcing pour production et enrichissement des données (linguiste vs locuteur) ; limites des données et rapport au contexte ; big data vs corpus pragmatiques contextualisés.

On abordera aussi les questions méthodologiques liées aux enjeux de la science ouverte et à l’application des principes FAIR (Findable, Accessible, Interoperable, Reusable) à notre domaine, visant donc à rendre les ressources produites faciles à trouver, accessibles, interopérables  et réutilisables ; dans ce contexte entreront les réflexions sur la préservation à long terme des données, leur description par des métadonnées adaptées, leur standardisation (en tenant compte des bénéfices mais aussi des limites de l’utilisation des formats actuels, en particulier de la TEI), les questions légales liées aux droits d’auteur et au respect de la vie privée (en particulier en développant les bonnes pratiques d’anonymisation qui sont préalables au partage des corpus). Ces recherches seront liées étroitement à la participation de Praxiling aux groupes de travail des consortiums CAHIER et CORLI, ainsi qu’aux initiatives internationales de standardisation des ressources linguistiques (en particulier dans le cadre de l’infrastructure CLARIN ERIC).

Les travaux de l’axe seront coordonnés avec les activités de la revue Cahiers de praxématique (notamment pour la création de référentiels terminologiques dans le domaine de la linguistique).

Des liens étroits avec le master de Sciences du langage du département de linguistique seront développés – via les enseignements et les stages – afin que les acquis novateurs de la recherche (méthodes, expérimentations…) viennent enrichir la culture scientifique des étudiants et renforcer leurs savoir-faire dans le domaine du numérique et de la science ouverte.